lundi 7 octobre 2013

Week End 05-06 Octobre 2013

D’où on vient ?
A partir de l’autobiographie de Paul de Tarse (Phillipiens 3, 4-11)
Notre destin est-il tout tracé depuis nos origines ?
Notre parcours autobiographique comme point de départ.




 
 Le point de Nicole 


L’EQUIPE DE DISCERNEMENT DEVIENT
UNE EQUIPE DES "AMIS DE LA MISSION DE FRANCE"

Une raison d’être de la Communauté Mission de France est celle d’envoyer des équipes comme témoin de la présence de Dieu, particulièrement auprès des pauvres, des étrangers et de ceux qui croient autrement. Vu ce que rapporte l’évangile, comment se fait-il que les pauvres, les étrangers et ceux qui sont loin de l’église (les païens) ne trouvent pas chez ceux qui s’en réclament un grand espoir ?
Comment se fait-il que les familles, les jeunes, peinent à rencontrer dans l’église un chemin de liberté vers Dieu, et la justesse d’une attitude chrétienne qui rende libre, joyeux et solidaire ?
Voilà le défi auxquels nous essayons de répondre.
Autrement dit, ce qui fonde une équipe de la Mission de France c’est une prise de conscience que l’Eglise doit sans cesse élargir l’espace de sa tente. Elle n’est pas faite pour tourner sur elle-même, mais pour permettre la rencontre universelle, à la manière du Christ. Pour manifester combien chaque être vivant est important aux yeux de Dieu, quel que soit son origine, son histoire, sa réflexion.
C’est pourquoi, elle en interpelle plus particulièrement "quelques uns" à être les artisans d’une présence plus universelle de l’évangile dans des milieux ou des territoires où l’église n’est habituellement pas connue, estimée ou attendue.
Ces "quelques uns" ne sont pas une élite, mais agissent pour le bien de tous, comme le ferment pour que toute la pâte lève. Tu sais bien que le levain est mélangé à la pâte, qu’il n’est pas forcément visible, qu’il ne fait pas de bruit, qu’il ne brille pas, mais qu’il agit au cœur et en douceur.
Madeleine et Hubert, Françoise et Jean-Bernard, Annie et Alain, Kay et Damien et moi-même avons pris la route il y a deux ans pour un éventuel engagement en qualité de membre de la Mission de France.
A l’issue de ce temps de discernement, nous avons décidé en l’état de nos vies de participer au réseau des amis de la Mission de France, en vivant une équipe de partage, en participant à tel ou tel événement ou rassemblement régional, en se nourrissant des publications de la MdF, en participant à la recherche commune…
Ces amis ne sont pas membres de la Mission de France, mais sont des sympathisants. Ils gardent leur autonomie, leur liberté d’initiatives.
Au mois de juin le groupe décidait de choisir une mission pour fédérer l’équipe.
Claire et Mikaël choisissait de poursuivre un autre chemin que la Pourraque et c’est tout naturellement que s’est imposée cette idée de les relayer.
Cinq week-ends dans lesquels un ou deux d’entre nous feront partie de l’équipe de préparation, ce qui permettra de tisser un fil conducteur et j’espère constituera un appui pour Bruno.



L' intro de Jean-Bernard
Bonjour à tous,

Pour succéder au thème du CORPS, il fallait un autre sujet vraiment ancré dans la réalité du quotidien, qui concerne chacun de nous : Ce corps pour quoi faire ? Quel CHEMIN est le sien, est le notre ?
Avec ce thème, vient celui de la confiance, sans laquelle on ne peut se mettre en route,  de 
voire celui de la FOI, selon les motivations qui nous animent,
celui de la LIBERTE, d'y aller ou pas,
 de la DIVERSITE des chemins, bon ou moins bons (chemins de traverses, chemins de liberté, chemins de foi, chemins de croix, etc....
Avec le chemin, viennent les perspectives :

Regarder en arrière, pour aller de l'avant; c'est le thème de ce 1er WE : "D'où on vient":
Si c'était un arbre, ce serait les racines. Si c'était une maison, ce serait les fondations. Si c'était un homme....le point de départ. Mon passé, ma vie, mon éducation : tout ce qui constitue mon autobiographie, on dit aussi "mon itinéraire". De quelle lignée humaine, tradition familiale suis-je le fruit ? Quel message a véhiculé mon éducation ? Chacun peut cocher la/les cases exactes :"Je t'aime parce que tu réusssis bien à l'école/ parce que tu fais bien ce que je te demande/ parce que tu es bien intégré et ne nous pose pas de problème/ au contraire, parce que tu n'es pas comme tout le monde/ je t'aime, mais...ou bien "Tu es mon enfant bien aimé, en toi je mets toute ma confiance, tout mon amour (Mt 3,17)".
Paul de Tarse nous a semblé être la figure biblique adaptée, pour nous aider à relire le chemin déjà parcouru.

Le 2ème WE nous verra suivre les pas d'Abraham :"Pars de ton pays et de la maison de ton père". Cela suppose d'abord une libération des peurs secrètes, de l'angoisse de manquer (celle qui détermine si on va voyager léger...ou lourd", parce que, les marcheurs du chemin de St Jacques le savent bien : si on ne dépuoille pas régulièrement pour marcher....on finit par s'arrêter !
Ensuite, sauf a se laisser balloter par les évènements, sans rien décider, dans le courant de la vie, cela suppose un appel, une vocation, qui nous pousse à nous mettre/nous remettre en route pour partir, larguer les amarres, passer du "rien" au "quelque chose", mais aussi parfois le courage de passer d'un confort insatisfaisant, mais établi, à une aspiration profonde, mais incertaine, éclairée par la nuit du doute.....(tout le monde n'est pas Mère Térésa pour quitter un couvent douillet pour la rue, mais on peut quitter une entreprise sûre, mais dont les valeurs et l'éthique commerciale ou salariale ne sont pas en rapport avec ce que l'on veut vivre professionnellement). Pour reprendre le langage d'Abraham, dont les troupeaux étaient nombreux : "Qu'est-ce qui me meut ?".

Une fois parti, comment éviter, comme Job, la panne, qu'elle soit de notre fait ou liée à d'autres (délivre nous du mal, et aide nous à pardonner...)ou bien liée à "la fatalité", le "malheur" ? C'est l'histoire de Job : c'est ce que nous aborderons durant le 3ème WE, peut-être en évoquant la prière et l'amour (ce qui est souvent la même chose) énergies renouvelables avant l'heure, à même de nous faire repartir du bon pied, ou tout au moins dans la bonne direction ...  De plus, quand on marche au jour le jour. Tous les jours sont intéressants.



Le 4ème WE, intitulé « Courage, fuyons », nous parlera de choix, et donc de discernement:               Avec une foi « à déplacer les montagnes », le problème est souvent de les reposer au bon endroit!      De même, quitte à se mettre en route, autant aller dans la bonne direction ... Ninive, Jonas fuit dans la direction opposée, à Tarsis « loin de la présence du Seigneur ... »  Le chemin peut parfois être -- une fuite salutaire: C'est la fuite libératrice du peuple d'Egypte, qui le  libère de l'esclavage. 
C'est aussi la fuite salvatrice en Egypte, devant le massacre des innocents. Ce peut être aussi une dérobade, telle celle typique de Jonas à Ninive ... où il aboutira finalement.


Et nous, quels sont nos choix, comment y répondons nous ? Là encore, tout un programme ...

Le 5ème WE,  sera celui de la synthèse, où la destination et le chemin ne feront qu'un, grâce à un outil révolutionnaire : La boussole.  Pour ne pas perdre le nord, c'est Tobie qui nous servira de guide, ou plutôt son guide, Raphaël, ou plutôt ... C'est toute une histoire, du chapitre 5 au ch. 12 du livre de Tobie, à lire. Tout ça me rappelle un autre guide, qui disait: « je suis le chemin et la vie» , dont le Père proclamait:    « je suis l'Amour» (Jn )

Donc sur ce chemin, on va peut-être dans un lieu où on est déjà: si le résultat est de mettre + d'amour (« aller vers le Royaume de Dieu» ) dans un quotidien ... que l'on vit déjà!  Et pour revenir à la boussole : finalement, le meilleur moyen de ne pas se tromper et trouver la direction de l'amour, c'est encore de devenir toujours plus ... aimants !
 



 Les textes que nous avons travaillé :
Samedi : Genèse 37, 1-36

Jacob demeura dans le pays où son père avait séjourné, dans le pays de Canaan.
Voici la famille de Jacob.
Joseph, âgé de dix-sept ans, faisait paître les moutons avec ses frères. Joseph était un enfant qui accompagnait les fils de Bilha et les fils de Zilpa, femmes de son père. Il rapporta à leur père le mal qu'on disait d'eux.
Israël aimait Joseph plus que tous ses autres enfants, car il était le fils de sa vieillesse, et il lui fit faire une tunique princière et ses frères virent que son père l'aimait plus que tous ses autres fils et ils le prirent en haine, devenus incapables de lui parler amicalement.
Joseph eut un songe et il en fit part à ses frères qui le haïrent encore plus. Il leur dit : Écoutez le rêve que j'ai fait : « Nous étions en train de lier des gerbes dans les champs, quand ma gerbe se dressa et qu'elle se tint debout, et vos gerbes l'entourèrent et elles se prosternèrent devant ma gerbe. » Ses frères lui répondirent : « Voudrais-tu donc régner sur nous en roi ou bien dominer en maître ? » et ils le haïrent encore plus, à cause de ses rêves et de ses propos.
Il eut encore un autre songe, qu'il raconta à ses frères. Il dit : «  J'ai encore fait un rêve : il me paraissait que le soleil, la lune et onze étoiles se prosternaient devant moi. » Il raconta cela à son père et à ses frères, mais son père le gronda et lui dit : « En voilà un rêve que tu as fait ! Allons-nous donc, moi, ta mère et tes frères, venir nous prosterner devant toi ? » Ses frères furent jaloux de lui, mais son père gardait la chose dans sa mémoire.
Ses frères allèrent paître le petit bétail de leur père à Sichem. Israël dit à Joseph : « Tes frères ne sont-ils pas au pâturage à Sichem ? Viens, je vais t'envoyer vers eux » et il répondit : « Me voici. ». Il lui dit : « Va donc voir comment se portent tes frères et le bétail, et rapporte-moi des nouvelles. » Il l'envoya de la vallée d'Hébron et Joseph arriva à Sichem.
Un homme le rencontra errant dans la campagne et cet homme lui demanda : « Que cherches-tu ? » Il répondit : « Je cherche mes frères. Indique-moi, je te prie, où ils paissent leurs troupeaux »  L'homme dit : « Ils sont partis d'ici, je les ai entendus qui disaient : Allons à Dotân »; Joseph partit en quête de ses frères et il les trouva à Dotân.
Il l'aperçurent de loin et, avant qu'il n'arrivât près d'eux, ils complotèrent de le faire mourir. Ils se dirent entre eux : « Voilà l'homme aux songes qui arrive ! Maintenant, venez, tuons-le et jetons-le dans n'importe quelle citerne; nous dirons qu'une bête féroce l'a dévoré. Nous allons voir ce qu'il adviendra de ses songes ! »
Ruben leur dit : « Ne répandez pas le sang ! Jetez-le dans cette citerne du désert, mais ne portez pas la main sur lui ! » C'était pour le sauver de leurs mains et le ramener à son père. Donc, lorsque Joseph arriva près de ses frères, ils le dépouillèrent de sa tunique, la tunique princière  qu'il portait. Ils se saisirent de lui et le jetèrent dans la citerne; c'était une citerne vide, où il n'y avait pas d'eau. Puis ils s'assirent pour manger.
Comme ils levaient les yeux, voici qu'ils aperçurent une caravane d'Ismaélites qui venait de Galaad. Leurs chameaux étaient chargés de gomme adragante, de baume et de laudanum, qu'ils allaient livrer en Égypte. Alors Juda dit à ses frères : « Quel profit y aurait-il à tuer notre frère et couvrir son sang ? Venez, vendons-le aux Ismaélites, mais ne portons pas la main sur lui : il est notre frère, de la même chair que nous. »  Et ses frères l'écoutèrent.
Or des gens passèrent, des marchands madianites, et ils retirèrent Joseph de la citerne. Ils vendirent Joseph aux Ismaélites pour vingt sicles d'argent et ceux-ci le conduisirent en Égypte. Lorsque Ruben retourna à la citerne, voilà que Joseph n'y était plus ! Il déchira ses vêtements et, revenant vers ses frères, il dit : « L'enfant n'est plus là ! Et moi, où vais-je aller ? »
Ils prirent la tunique de Joseph et, ayant égorgé un bouc, ils trempèrent la tunique dans le sang. Ils envoyèrent la tunique princière, il la firent porter à leur père avec ces mots : « Voilà ce que nous avons trouvé ! Regarde si ce ne serait pas la tunique de ton fils. » Celui-ci regarda et dit : « C'est la tunique de mon fils ! Une bête féroce l'a dévoré. Joseph a été mis en pièces ! » Jacob déchira son vêtement, il mit un sac sur ses reins et fit le deuil de son fils pendant longtemps. Tous ses fils et ses filles vinrent pour le consoler, mais il refusa toute consolation et dit :  « Non, c'est en deuil que je veux descendre au shéol auprès de mon fils. Et son père le pleura. » Cependant, les Madianites l'avaient vendu en Égypte à Potiphar, eunuque de Pharaon et commandant des gardes.


Au delà de l'histoire qu'est ce que nous dit ce texte ?
* Quels sont les éléments décisifs et fondateurs dans la vie de Joseph ?
* Comment comprendre le "Que cherches tu "?
Comment ce texte nous rejoint dans notre vie ?
* Qu'elles questions se posent dans le texte ? A quoi renvoient-elles dans notre vie ?
* Dans notre jeunesse avons-nous eu des ruptures, des changements de direction, 

choisies ou subies ? Qu'en avons nous fait ?

* Qui suis-je ? Qu'est ce que je découvre de moi par les autres ?






















































Dimanche : Philippiens 3,4-11

(…) J'ai des raisons d'avoir confiance en moi-même. Si un autre croit pouvoir se confier en lui-même, je le peux davantage, moi circoncis dès le huitième jour, de la race d'Israël, de la tribu de Benjamin, Hébreu fils d'Hébreux ; pour la Loi, Pharisien,  pour le zèle,  persécuteur de l'Église ; pour la justice qu’on trouve dans la Loi, une homme irréprochable.
Or toutes ces choses qui étaient pour moi des gains, je les ai considérées comme une perte, à cause du Christ. Mais oui, je considère que tout est perte en regard de ce bien suprème qu’est la connaissance de Jésus Christ mon Seigneur. A cause de lui j’ai tout perdu, et je considère tout cela comme ordures afin de gagner Christ et d’être trouvé en lui, non plus avec une justice à moi, qui vient de la loi, mais avec celle qui vient par la foi au Christ, la justice qui vient de Dieu et s’appuie sur la foi. Il s’agit de le connaître, lui, et la puissance de sa résurrection, et la communion à ses souffrances, de devenir semblable à lui dans sa mort, afin de parvenir si possible à la résurection d'entre les morts.


Au delà de l'histoire qu'est ce que nous dit ce texte ?
* Quelle relecture spirituelle Paul fait-il de son chemin ?
Comment ce texte nous rejoint dans notre vie ?
* Qu'est ce qui est gain ou perte dans ce que nous avons reçu ? Qu'est ce qui nous fait dire celà ?
* Qu'est ce qui nous fait croire en Dieu ? Qu'est ce qui nous fait croire en nous ?
* Où situons nous Dieu dans notre chemin de vie ? 
* Qu'est ce qui est élément fondateur pour nous ? Hérité et/ou choisi ? Comment chacun d'entre nous avons découvert notre foi ?


Un texte lu lors de soirée de Samedi : 



Et Dieu fut
(Pierre Rabhi – Du Sahara aux Cévennes, Albin Michel, coll. Espaces libres, pp 267-272)
 
          Je m'aperçois qu'il est plus difficile de rendre compte du présent que de fouiller dans la mémoire pour en extraire du passé. […] J'existais en puissance depuis longtemps, je me vois poindre dans mes grands-parents, je me confirme dans mon père et ma mère : des traits de caractère, physiques, moraux, tradition, éducation et culture. Le je ne peut jamais désigner un être intègre et immobile, mais un mouvement, la ronde inexorable de tout ce qui l'emprunte, comme un chemin pour aller au-delà de lui-même. Et déjà, dans mes enfants, cette chose resurgit et, par moments, apparaît par petites touches ce qui caractérisa leurs arrières-grands-parents.

Tout ceci m'oblige à poser la question : vivons-nous ou sommes-nous vécus ? Ou bien : quelle est la part de ce qui nous vit et celle que nous vivons ? Ou bien encore : la vie n'est-elle pas un rêve ? […] 
 
Il fallut trouver un sens à tout cela et l'islam m'en donna un. Allah transcende tout. Il est vérité, omnipotence, omniprésence, omniscience, etc. […] Mais mon histoire concrète a fini par ne plus s'accorder avec la tradition initiale.  […][J'ai été] invité à vivre d'un autre message qui fait de Jésus-Christ le centre. De savoir ma petite barque orientée vers une destination, un port inconnu mais qui néanmoins m'assure une échéance, m'a donné des forces que j'aurais mauvaise grâce à  renier. […]



J'ai pleinement conscience de l'état de notre monde, des misères et des souffrances qui affectent même les innocents, toute interrogation sur le sens est suivi d'un incommensurable silence. L'apocalypse est permanente. [Un jour je demandai à mon ami Jacques :] Les religions affirment que Dieu est omniscient, alors pourquoi a-t-il voulu tant de douleurs ?

Nous avions fini le retourné de foin coupé du matin d'où commençait à s'échapper cet arôme particulier porteur de félicité et de promesses subtiles. Assis au bord du pré, nous goûtions à la légèreté qui suit l'effort. Dans les yeux de mon ami passa une sorte de nuage léger comme une miette de stupeur.

- C'est un mystère... [répondit-il.]

- En face, continuais-je, sont ceux qui prétendent avoir acquis des certitudes avec la connaissance scientifique ou philosophique. Nous avons vu certains d'entre eux faire demi-tour sur nos chemins d'espérance pour nous dire que ceux-ci ne conduisaient nulle part. Dans le même temps, d'autres nous affirment qu'il y a un sens caché qui nous sera révélé un jour, nous invitant ainsi à continuer à marcher dans nos guenilles, nos trébuchements, nos inquiétudes. Le terme vaut la peine, nous assurent-ils.

Jacques m'écoutait poliment, mais je le sentais sur la défensive.

-Nous sommes libres, affirma-t-il, de faire les choix qui nous conviennent.

Ne voulant pas le blesser, je lui répondis avec mille précautions.

-Si nous sommes vraiment libres, comment se fait-il qu'on ne nous ait même pas consultés avant de nous faire exister ?

-Ne sois pas trop logicien, c'est la marque de l'orgueil, répondit mon ami. Tu as tout de même un libre arbitre, et comment peux-tu affirmer que tu n'as pas donné ton consentement pour l'aventure ?



Je me mis à songer à un autre ami pour qui la réincarnation était presque une évidence. A cette même interrogation, il m'avait répondu que je n'existerais pas si je n'avais originellement consenti à exister.



Notre dialogue avec Jacques se poursuivit ainsi longtemps. J'expliquai à mon ami le choc violent de mon enfance, lorsque, sorti d'une tradition qui enseigne que Dieu ne peut être même imaginé tant il transcende tout, on me désigna, accrochée au mur, l'image d'un supplicié qui, me dit-on, n'était autre que lui. Après l'avoir violemment réprouvé, je devais, quelques années plus tard, m'incliner en adoration devant la même et pathétique image. J'éprouvais une sorte de sens à me maintenir dans la douleur que son règne semblait sublimer. Et puis je me suis dit qu'il s'était ressuscité et avait, par cet acte, fondé la règle de la vie.[...]



Jacques et moi fîmes brusquement silence, presque honteux d'avoir troublé la paix environnante par nos spéculations inquiètes. […]



Nous marchions depuis quelques minutes sur le chemin raboteux qui s'abaisse vers les basses terres lorsque je sentis le bras de mon ami sur mon épaule, dans cet instant, Dieu fut.