Le WE5 de juin fera la place à la rencontre dans le travail.
Nous avons donc orienté ce WE4 de mai sur le sens du travail, l'absence de travail et
la solidarité qui en découle.
Au départ nous étions interpellés par le sens du travail
issu de la Génèse (3, 17-19) :
"Eh bien, par ta faute, le
sol est maintenant maudit. Tu auras beaucoup de peine à en tirer ta nourriture
pendant toute ta vie ; il produira pour toi épines et chardons.
Tu devras manger ce qui pousse
dans les champs ; tu gagneras ton pain à la sueur de ton front, jusqu'à ce que
tu retournes à la terre dont tu as été tiré. Car tu es fait de poussière, et tu
retourneras à la poussière."
Le travail serait donc une punition, ou plutôt, une fatalité
de notre condition humaine si bien imagée dans la Génèse.
Notons que les animaux ne travaillent pas. Le travail est
donc bien caractéristique de notre humanité.
Mais n'y a-t-il pas une vision plus positive de la notion de
travail ?
Clin d'œil au peuple Hébreu qui quitte son état d'esclavage
d'Egypte en ayant confiance en Dieu et Moïse et en leur avenir. Ils découvrent alors
les joies du désert et du nomadisme pendant 40 ans.
Nous avons constaté qu'au milieu des épreuves, au milieu des
chantres qui, comme toujours, font l'éloge du passé (c'est-à-dire l'esclavage)
au lieu de regarder en avant, avec la soif et la faim qui les tenaille, Dieu
envoie la manne à son peuple, signe de confiance (Exo 16, 16-18).
"Que chacun en ramasse la ration qui lui est nécessaire
; vous en ramasserez environ 4 litres par personne, d'après le nombre de
personnes vivant sous la même tente." Les fils d'Israël agirent ainsi ;
ils en ramassèrent, les uns beaucoup, les autres peu. Mais lorsqu'ils en
mesurèrent la quantité, ceux qui en avaient beaucoup n'en avaient pas trop, et
ceux qui en avaient peu n'en manquaient pas. Chacun en avait la ration
nécessaire."
De son côté, Paul demande aux Corinthiens de vivre la
solidarité dans la communauté (2Cor 8, 13-14) "Il ne s'agit pas de vous
faire tomber dans le besoin pour soulager les autres, mais c'est une question
d'égalité. En ce moment, vous êtes dans l'abondance et vous pouvez donc venir
en aide à ceux qui sont dans le besoin. Puis si vous êtes un jour dans le
besoin, et eux dans l'abondance, ils pourront vous venir en aide. C'est ainsi
qu'il y aura égalité."
Face à la répartition
équitable à la juste mesure du besoin, Oxfam nous informe qu'1% de la
population détient la moitié des richesses (c'est-à-dire du bien commun) et que
80% de la population bénéficie de 5,5% des richesses.
L'Eglise propose un éclairage dans ses prises de position.
Un an après la création de Solidarnosk, quelques mois après la tentative
d'assassinat dont il a été victime, Jean Paul II publie, en septembre 1981,
"Laborem exercens", 90 ans après "Rerum novarum" de Leon
XIII. Ce texte est étonnement lucide sur ce que nous vivons en 2015 et ce que
Giuseppe nous a présenté des évolutions à venir dans un futur proche.
Ainsi Jean Paul II décrit : "S’il est vrai que l’homme
se nourrit du pain gagné par le travail de ses mains Cf. Ps 127 (128), c’est-à-dire non
seulement du pain quotidien qui maintient son corps en vie, mais aussi du pain
de la science et du progrès, de la civilisation et de la culture, c’est
également une vérité permanente qu’il se nourrit de ce pain en le gagnant à la sueur de son front Gn 3,19. ,
autrement dit par son effort et sa peine personnels, et aussi au milieu de
multiples tensions, conflits et crises qui, en rapport avec la réalité du
travail, bouleversent la vie de chaque société et même de toute l’humanité…
Le travail, c’est certain, est quelque chose de «vieux»,
d’aussi vieux que l’homme et que sa vie sur terre. Toutefois, la situation
générale de l’homme dans le monde d’aujourd’hui, … exige que l’on découvre les nouvelles significations du travail
humain et que l’on formule aussi les nouvelles
tâches qui, dans ce secteur, se présentent à tout homme, à la
famille, aux nations particulières, à tout le genre humain, et enfin à l’Église
elle-même…
L’homme, à quelque tâche qu’il soit attelé, relativement
primitive ou, au contraire, ultra-moderne, peut aisément se rendre compte de ce
que, par son travail, il
hérite d’un double patrimoine : il hérite, d’une part, de ce
qui est donné à tous les hommes sous forme de ressources naturelles et, d’autre
part, de tout ce que les autres ont déjà élaboré à partir de ces ressources,
avant tout en développant la technique, c’est-à-dire en réalisant un ensemble
d’instruments de travail toujours plus parfaits. Tout en travaillant, l’homme
« hérite du travail d’autrui » Cf. Jn 4,38.
Même s’il est associé à la fatigue et à l’effort, le travail
ne cesse pas d’être un bien, en sorte que l’homme se développe en aimant son
travail.
Ce caractère du
travail humain, tout à fait positif
et créateur, éducatif et méritoire, doit constituer le fondement
des estimations et des décisions qui se prennent aujourd’hui à son égard, …,
comme l’attestent les Déclarations
internationales et aussi les multiples Codes
du travail…
Le problème du travail s’est posé en fonction du grand conflit (historique) qui,
.., s’est manifesté entre le « monde
du capital » et le « monde
du travail », autrement dit entre le groupe restreint, mais
très influent, des entrepreneurs, des propriétaires ou détenteurs des moyens de
production et la multitude plus large des gens qui, privés de ces moyens, ne
participaient au processus de production que par leur travail.
Ce conflit a eu son origine dans le fait que les
travailleurs mettaient leurs forces à la disposition du groupe des
entrepreneurs, et que ce dernier, guidé par le principe du plus grand profit,
cherchait à maintenir le salaire le plus bas possible pour le travail exécuté
par les ouvriers. À cela il faut encore ajouter d’autres éléments
d’exploitation, liés au manque de sécurité dans le travail et à l’absence de
garanties quant aux conditions de santé et de vie des ouvriers et de leurs
familles.
Or, … on doit constater dès maintenant que l'ensemble de moyens (appelé
"capital) est
le fruit du patrimoine historique du travail humain…"
Le capital étant lié à la propriété, "la propriété
s’acquiert avant tout par le travail et pour servir au travail…
Tout ce qui est contenu dans le concept de
« capital », au sens restreint du terme, est seulement un ensemble de
choses. Comme sujet du travail, et quel que soit le travail qu’il accomplit,
l’homme, et lui seul, est une personne…
Ainsi, on ne saurait séparer le « capital » du
travail,… on ne saurait en aucune manière opposer le travail au capital, ni le
capital au travail, et moins encore, les hommes concrets, désignés par ces
concepts…
Lorsque l’homme travaille, en utilisant l’ensemble des
moyens de production, il désire en même temps que les fruits de son travail
soient utiles, à lui et à autrui, et que, dans le processus même du travail, il
puisse apparaître comme co-responsable et co-artisan au poste de travail qu’il
occupe.
De là découlent divers droits spécifiques des travailleurs,
droits qui correspondent à l’obligation du travail… au devoir de l'homme…
(D'un côté), c’est la prise en considération des droits
objectifs du travailleur, quel qu’en soit le type : travailleur manuel,
intellectuel, industriel ou agricole, etc., qui doit constituer le critère adéquat et fondamental
de la formation de toute l’économie…
(Dun autre côté), l’homme doit travailler par égard
pour le prochain, spécialement pour sa famille, mais aussi pour la société à
laquelle il appartient, pour la nation dont il est fils ou fille, pour toute la
famille humaine dont il est membre, étant héritier du travail des générations
qui l’ont précédé et en même temps co-artisan de l’avenir de ceux qui viendront
après lui dans la suite de l’histoire. Tout cela constitue l’obligation morale du travail.
Le contraire d’une situation juste et correcte … est le
chômage, c’est-à-dire le manque d’emplois pour les sujets capables de
travailler…
L’obligation de prestations en faveur des chômeurs,
c’est-à-dire le devoir d’assurer les subventions indispensables à la
subsistance des chômeurs et de leurs familles, est un devoir qui découle du
principe fondamental de l’ordre moral en ce domaine, c’est-à-dire … du droit à
la vie et à la subsistance.
C’est en cette direction que peut se mettre en œuvre le plan
d’un progrès universel et harmonieux de tous, conformément au fil conducteur de
l’encyclique Populorum
progressio de Paul VI… Une vérification du progrès sera la
reconnaissance toujours plus consciente de la finalité du travail et le respect
toujours plus universel des droits qui lui sont inhérents, conformément à la
dignité de l’homme, sujet du travail.
Alors, que penser, que devons nous faire ?
Nous vous invitons donc à réfléchir, dès ce samedi
après-midi, sur la relation contractuelle dans le lien de subordination (c'est
à dire le monde du travail). Nous aborderons donc le travail et l'absence de
travail.
Demain, nous ouvrirons la réflexion sur la gestion du bien commun
(c'est-à-dire selon Bernard Marris, sur la définition qu'il fait du mot
économie) en ouvrant quelques morceau choisi de Vatican 2 dans Gaudium et Spes
que nous introduira Bruno. Avec ce support, nous ouvrirons nos réflexions à la
solidarité (travailler gratos).